Voilà une semaine sans article, et vous êtes en manque, n'est-ce pas ? Rassurez-vous, voilà de la lecture, et j'vais tâcher de rendre passionnante une semaine qui le fut, dans l'ensemble. Au menu : découverte d'un nouveau village, déconvenues, joies, déconvenues, nouvelles situations de travail. Comme c'est diablement long, je vous sépare ça en deux articles, celui-ci sur l'arrivée dans le village et l'autre sur mes rencontres et le village en lui-même !
C'est de ce côté, je crois, mais je ne vais pas y aller à pied.
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Je vous ai donc relaté dans de précédents articles mon quotidien à Ibiato et comment se passait un peu mon travail. C'est que je prévoyais d'en partir, de ce village, à ce moment-là. Ce ne sera pas sans mal. Je repars de Trinidad le jeudi 18 août, dans un taxi bondé de Sirionos. Je ne crois pas avoir expliqué comment se déroulent les trajets entre la ville et le village alors allons-y rapidement. Il y a une compagnie de taxis spécialisée dans cette direction-là, avec une douzaine de chauffeurs qui desservent les premiers villages à l'Est de la ville. Le trajet coûte en général 15bol (1,5 euros) pour Casarabe, ville d'où part la route vers le territoire Siriono. Pour Ibiato c'est 20bol (2 euros) et Ngirai 25 (2,5 euros). Le trajet dure plus ou moins une heure et quart, en général dans un véhicule plein à ras-bord, parfois avec une personne allongée dans le coffre. Le taxi participe au ravitaillement et fait des détours pour déposer des colis un peu partout.
J'étais donc dans un taxi, dans l'espoir d'aller directement à Ngirai puisque j'avais tous mes sacs avec moi. Raté. A peine arrivé à Ibiato, le conducteur me demande de descendre. Je réplique énervé à mon hôte d'Ibiato que je veux aller à Ngirai et il demande vaguement au chauffeur, celui-ci refusant. Je descends donc et on attend une moto pour faire le trajet. Fernando, mon hôte, me propose de n'y aller que le lendemain, puisqu'il est déjà tard... J'ai passé une partie de l'après midi à attendre à la station de taxi qu'il vienne alors oui, il est tard. Je suis assez crevé et j'accepte son offre, sachant aussi qu'il ne sera pas là le lendemain et qu'il ne pourra pas m'accompagner. C'est qu'il a une façon d'expliquer mon projet peu convaincante en fait, puisqu'il ne l'a pas très bien compris je crois. Du coup, d'y aller sans lui me semble préférable.
Proche du village, construction d'une piscine olympique pour poissons. |
On arrive au vendredi 19 août au matin. Je laisse du linge sale, sur proposition de mon hôte et prends une moto-taxi pour Ngirai. Le voyage coûte 15 bol et dure une vingtaine de minutes. J'arrive chez une dame qui ne s'attendait pas du tout à ma venue, ni à ma demande d'hébergement. Elle est désemparée, et pas contente que j'arrive seul. Elle me conduit chez un homme qui m'accueille en me disant « mais, je te connais pas ! ». Il m'explique qu'il m'a vu lors d'une réunion à Ibiato mais que l'on a pas été présenté. Je comprends alors que le président du territoire n'a pas du tout parlé de mon projet !
Il me dit qu'il n'est pas d'accord pour que j'aille de maison en maison parler de mon projet. Il veut que je le présente lors de la prochaine réunion du village. J'approuve, puisque ça peut m'éviter de présenter quinze fois mon projet, et ça me semble une façon de faire plus transparente et plus officielle. On va alors voir le président du village. Ce n'est pas un maire (alcalde) car Ngirai n'est qu'un hameau d'un autre village plus loin. Je réexplique mon projet et donne une copie de la lettre de présentation que m'a donnée ma co-directrice de recherche. Il est aussi professeur du village, et je ne sais pas si c'est pour ça mais en tout cas il comprend très bien de quoi je lui parle. Il m'annonce finalement que la prochaine réunion sera le lundi 22 août, et que je n'aurais qu'à revenir à cette date-là. Il pourra alors m'héberger sans problème.
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Vision triste du village, jour de froid.
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Je repars donc, à peine deux heures après être arrivé. J'hésite à aller à Ibiato ou à Trinidad, mais je me convainc de retourner au village. En fait, de discuter de la connaissance de mon projet m'a fait réaliser qu'à Ibiato, je n'avais pas présenté mon projet à la communauté et qu'il serait peut-être bon que je le fasse. Les réunions étant le samedi, autant en profiter pour faire ça. Je ne regrette cependant pas la façon dont ça s'est déroulé, puisque j'aurais bien été incapable de faire une présentation le jour de mon arrivée, ne bafouillant qu'à peine en espagnol.
J'en profite aussi pour revoir le professeur de l'école avec qui je travaillais et enregistrer une cinquantaine de mots. Je revois aussi un couple qui m'avait parlé de plusieurs choses et je tente de transcrire deux textes d'eux. Je me trouve limité par le fait qu'ils partent à Cochabamba pour le weekend. En fait, c'est un mal pour un bien car ils vont y présenter un film qui s'appelle Siriono, sur lequel j'aimerais travailler. Il raconte de façon un peu folklorique la vie dans le village dans les années 80 et les problèmes dûs à une éducation refusant la langue des enfants. Il y a des bouts en siriono dedans et j'espère pouvoir en ramener une bonne copie pour bosser dessus, puis pour vous le montrer aussi, parce qu'il y a plein de choses chouettes dedans. Et à Cochabamba il y a le directeur du projet, donc j'aurais peut-être un accord et une bonne copie du film...mais ça je verrais plus tard.
Je crois que je ne vous avais pas encore montré ce pont suspendu.
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La réunion a finalement lieu le dimanche soir, suite à des problèmes d'organisation. Le mot d'ordre principal est la marche indigène (voir article précédent). Elle est partie depuis presque une semaine et les Siriono veulent s'y joindre par solidarité. C'était très intéressant comme discussion, et j'ai presque tout compris, puisque tous ne parlaient qu'en espagnol. Après deux heures environ, ils avaient une liste de 35 personnes motivées pour y aller et ils ont glissé vers un autre sujet, le temps d'appeler diverses personnes pour vérifier leur accord pour garder les enfants de ceux qui partaient.
Le président du territoire en a alors profité pour me laisser la parole, présentant avant ça mon projet d'une manière catastrophique. J'en ai eu du mal à reprendre et la fatigue n'aidant pas, je n'ai pas été très clair. J'étais un peu déçu, mais je sentais aussi que ce n'était pas l'ambiance. J'ai donc eu droit à un consentement mou du village pour que je puisse continuer à faire mon truc dans mon coin...ce qui est toujours mieux que rien.
Hop, l'espoir revient (et j'ai pas beaucoup de nouvelles photos) |
Le lendemain, retour à Ngirai ! Youpi, Ibiato c'est fini...vive le changement ! Je reprends donc une moto et découvre ma nouvelle maison ! Je vais voir le professeur à l'école, qui me présente aux enfants. Il me dit qu'il va parler aux parents et que la réunion se fera dans l'après midi. J'en profite pour me reposer. Je découvre au repas que la maîtresse de maison, dont je n'ai pas retenu le prénom, n'aime pas trop la viande et cuisine donc plein de légumes. Joie joie joie, enfin de la verdure !
Je vais ensuite à la réunion, qui commence vers 15h, le temps que tout le monde arrive. Le président du village commence par lire la lettre de ma co-directrice de recherche, qui est assez magique, hein. Elle dit notamment que j'suis une personne géniale et un très bon étudiant, tout ça. Reprendre après ça est une joie et j'ajoute donc quelques mots. Une première personne prend alors la parole dans la salle pour dire qu'elle trouve ça intéressant, que ça lui fait plaisir qu'une personne s'intéresse à sa langue. Une autre approuve, disant que la langue est une partie de leur culture et qu'ils en sont fiers.
Le président du village ajoute des détails à mon projet, rajoutant que je suis étudiant donc que je ne viens pas apporter des sous mais seulement une aide sur la langue. L'ensemble est très bien accueilli et tout le monde est d'accord, voire enthousiaste. La réunion se poursuit sur la marche et plusieurs personnes s'expriment en siriono ! La situation est donc bien différente dans ce deuxième village ! Je sors de la réunion très satisfait, malgré que je sache qu'une quinzaine de Siriono vont partir le lendemain rejoindre la marche, ce qui fait presque cinquante en tout. Ce sont des personnes avec qui je ne pourrais pas parler cette année, mais en un sens, je suis assez impressionné qu'autant de gens soient motivés pour marcher durant une quarantaine de jours, dans une région pas franchement très accueillante, avec un fort dénivelé.
Une autre vue de Ngirai, avec une lumière vraiment pas top. |
Mais nous voilà donc à Ngirai; où je découvre une situation nouvelle dans laquelle les gens ont envie de parler avec moi, veulent que je reste pour les aider et pour me raconter plein d'histoires. Une situation bien différente de celle d'Ibiato, mais que je vais détailler un peu dans un autre article, celui-ci étant déjà bien long ! Je conclurais donc cette entrée dans le village par un soupir de soulagement, ayant fait les choses correctement. Le temps perdu, qui m'empêchera finalement de visiter une autre partie du pays est aussi du temps gagné puisqu'aujourd'hui je suis bien plus tranquille quant à la faisabilité de mon projet, donc je pourrais revenir !
La suite, demain !
Youpie, tu ne nous oublie pas !
RépondreSupprimerJe suis bien content que tu aies à ta disposition des gens motivés, et des légumes ^^
moi aussi, ça me fait très plaisir que tu retrouves ton enthousiasme! le temps qui a l'air perdu n'est jamais tout à fait perdu... tu profiteras mieux ici à Ngirai après avoir fait ton expérience à Ibiato et c'est motivant pour l'avenir hein!
RépondreSupprimercool tout ça !! ça fait plaisir que de voir que ça se fini sur une bonne note !!
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