Pitch

Fragments de voyages en Bolivie par un apprenti linguiste étudiant la langue des Siriono.

lundi 5 août 2013

Le Sucre c'est capital

J'ai passé une semaine à Sucre et j'en suis revenu pour la fête d'Ibiato, qui fera l'objet d'un prochain message. Dans celui-ci je vais vous raconter un peu ce changement d'air qui fut plus que bienvenue après deux mois de terrain. La ville de Sucre est la capitale constitutionnelle de Bolivie, même si le gouvernement est à La Paz et que la capitale économique est maintenant Santa Cruz. Sucre, c'est une des plus anciennes ville de Bolivie, et elle renferme notamment la plus ancienne université d'Amérique du Sud (enfin ça, c'est comme les plus hautes tours d'Europe, ça dépend comment on calcul, mais en gros, c'est ancien). C'est à 1300km horizontalement de Trinidad et environ 2400 mètres verticalement.
La tour de contrôle de l'aéroport, un cliché tout à fait touristique.
Le gardien de l'aéroport, qui me regarde passer d'un œil gourmand.
Je suis partis du village alors qu'une masse d'air froide passait sur pays, venant de Patagonie. Il faisait froid et mon hôte m'a donc prêté un manteau du genre à la mode enfantine dans les années 90. J'suis partis en moto un lundi après midi jusqu'à Casarabe où j'ai attendu un taxi pour Trinidad. Là-bas j'ai pu acheter un veste en cuir et des gants pour le taxi sympa qui m'avait conduit jusqu'à Casarabe. J'ai laissé le manteau moche à mon hôte après qu'il m'eut accompagné au terminal de bus. Comme c'est lui qui a demandé pour une place de bus, j'ai payé largement moins cher que d'habitude. J'embarque après avoir dîné avec un couple d'anthropologue qui viennent vivre un an en Bolivie.
Première soirée, je marche au hasard, grimpant la première colline qui passe.
En errant, je tombe sur groupe qui danse. Mon appareil floute automatiquement les visages, pratique.
Le voyage se passe tranquillement, le bus fait une halte toilettes au milieu de nul part, à côté d'un panneau indiquant « Littoral », ce qui était assez surréaliste en plein milieu de la Bolivie. A Santa Cruz j'ai retrouvé par chance un collègue français ainsi qu'un historien américain de passage, que j'ai rencontré pour l'occasion et qui était très sympa. On est allé manger indien et chinois, ce qui était diablement agréable après deux mois de nourriture monotone. Les épices me manquent terriblement, ainsi que les légumes revenus au wok ou bouillis. De discuter en français, puis en anglais, c'était aussi très agréable, même si cette année je discute davantage par Skype avec Aurore.
Un plat d'Oruro, une autre ville du coin, la partie jaune sont du maïs mélangé à des pâtes, à côté la viande est épicée
et c'est un jus que je bois, sur cette nappe au motif cliché.
Les fleurs aussi sont différentes ici.
Départ pour Sucre avec en poche quelques conseils de l'historien qui venait de passer deux mois là-bas. J'arrive dans le B&B Santa Cecilia, une pension proposant des chambres pas trop chères, avec une cuisine commune et une terrasse ensoleillée bien agréable les premiers jours de frimas. La masse d'air froide était sévère, j'ai dû aller m'acheter un pull et un bonnet pour tenir. Je me suis un peu enrhumé puis mon nez s'est mis à saigner tout seul plusieurs fois, mais sinon ça a été. Me retrouver dans une maison en dur, avec une couette et une douche m'a fait vraiment plaisir !
Vue de la ville depuis une hauteur, car la ville est loin d'être plate.
Je déroge mon recadrage en seize neuvième pour cette vue à la grecque.
Je suis allé me promener pour aller manger du poisson à l'autre bout de la ville, de l'alose si j'ai bien compris le nom, en buvant un jus de tumbo, une sorte de fruit de la passion (passiflora tripartita var. Mollissima si je ne me gourre pas). J'suis allé à l'autre bout de la ville pour rencontrer des groupes de jeunes dansant avec enthousiasme une sorte de rock acrobatique synchronisé assez impressionnant. Je pense qu'ils se préparaient pour la fête nationale du 6 août. Pas mal de gens qui faisait leur footing, des couples qui s'embrassaient sur les bancs publics, des jeunes qui jouaient aux cartes. J'ai vraiment réalisé l'écart avec Ibiato ou Trinidad où toute ces choses sont absentes. Jamais je n'ai vu de couples s'embrasser ou de jeunes faire du sport. Le changement de climat n'y est évidemment pas pour rien, et je retrouve d'ailleurs des looks vestimentaires bien plus proches des looks occidentaux.

On dirait que cette maison a été tracé au crayon, non ?
Et celle-ci à grand coup de peinture pure.
Il y a beaucoup de touriste et encore plus dans les lieux les plus courus comme la Recoleta, une place en haut d'une colline avec une jolie vue sur la ville. Il s'y trouve un chouette musée sur la culture locale où j'ai pu apprendre plein de choses sur les tapis et danses traditionnelles de la région. Il y a aussi un chouette marché et un cimetière qui a droit à son propre article. Je n'ai pas pu m'empêcher de penser qu'avoir Sucre comme base pour une étude à l'étranger serait infiniment mieux que Trinidad. Même si j'ai des collègues qui étudient encore plus loin de la ville, j'ai vraiment réalisé le changement de vie auquel j'étais forcé en étudiant si loin de tout, dans un endroit si peu intéressant, où les touristes ne vont pas, où il n'y a rien à faire sinon élever des poules et des enfants.
Ici en revanche, même les ouvriers lisent le journal sur la place principale.
Et il y a des théâtres. J'ai aussi pu voir une expo d'art persan et écouter un bout de hard rock lycéen.
J'ai pu profiter de la ville, et encore plus lorsque mes collègues sont arrivés et qu'ils ont débarqué dans mon hôtel, sur mon conseil. On a formé le temps d'un souffle une petite communauté de linguistes tout à fait agréable. Il y avait un marxiste canadien, un curieux britannique, une anarchiste allemande, une vive hollandais et une amusante allemande mariée à un bolivien. Un brin de monde, tous intéressants et autonomes au possible. Pas d'activités de groupes donc, sinon des soirées à trinquer au mojito et à la bière locale, qui vaut bien celle que je bois parfois au village.
Voici le marché noir, ce qui est son vrai nom, et effectivement, on y trouve surtout des produits tombés du camion, comme on dit.
Et voilà le marché paysan, où il est possible de trouver de tout, mais c'est un tel bazar qu'une chatte n'y trouverait pas ses petits.
Je termine de préparer ma présentation dans l'après midi puis passe la soirée à réviser un article avec une collègue avant de m'enfoncer sous la couette en me disant que je ne vais sûrement intéresser personne. J'ai parlé une vingtaine de minutes sur l'évolution des méthodes documentaires et du rapport entre le document et l'objet, en prenant comme focus le siriono. Je pense que j'aurais pu rendre ça plus intéressant que ce que j'ai réussi à faire, mais au moins j'ai montré quelques jolies photos et pu discuter de ça avec des gens intéressants. A vrai dire, à notre journée linguistique, rare étaient les étrangers, les anthropologues ou historiens à venir nous écouter. La moitié d'entre nous était pourtant à une présentation de ces gens là la veille, à les écouter parler de la région où nous faisons nos études, avec un autre point de vue. J'ai pu discuter ainsi avec deux historiennes espagnoles qui étudient dans mon coin et avec qui je vais échanger quelques informations.
Une jolie tour Eiffel, non pour la forme mais pour l'homme.
A l'origine, servait comme observatoire, aujourd'hui comme sympathique point de vue.
Autour s'étend le parc Bolivar, avec un joli petit canal au centre.
Je me suis éclipsé fourbement le temps d'une présentation pour retourner à un endroit que j'avais repéré plus tôt, un fabricant de charango qui en avait d'assez beau. Le charango est un instrument de musique traditionnel des Andes, une sorte de petite guitare à cinq cordes doublées à l'octave, dont la caisse de résonance était autrefois faite du corps d'un tatou. Aujourd'hui ils sont fait de beau mais continuent à être utilisés dans la musique populaire de cette partie de la Bolivie. A défaut d'avoir un inexistant instrument siriono pour m'occuper les semaines à venir, j'aurai ce curieux objet dont je joue un peu comme d'un ukulélé, ce qui donne un son étonnant.
Un autre fait bizarre, un anniversaire avec défilé sous ma porte d'une dizaine de voitures couvertes de peluches,
couvertures colorées, vaisselles et autres choses duveteuses.
Une autre vue de la ville, avec de jolis câbles électriques.
Après un dernier repas délicieux avec mes collègues, je m'endors plein de souvenirs et un peu anxieux pour mon retour, car il doit se faire dès le lendemain de ma présentation, sans attendre la fin du congrès. La fête d'Ibiato m'attend avec son défilé traditionnel, qui doit avoir lieu le soir du premier août, jour même où je quitte Sucre. Le vol jusqu'à Santa Cruz se passe sans problème, d'autant que ma collègue allemande est par coïncidence du voyage, ce qui nous permet de boucler notre article, tout en profitant de la magnifique vue sur les collines du sud de la Bolivie. Arrivé à Santa Cruz, j'appelle mon hôte au village pour savoir ce qu'il en est et il me dit qu'ils sont pas prêt, qu'ils reportent au lendemain. Ouf. J'appelle alors mon collègue français, partis donner à la communauté avec laquelle il travaillait le résultat définitif de son étude. Il est dans le bus, en voyage pour Santa Cruz où je peux le retrouver tranquillement l'après midi, avant de voyager de nuit pour Ibiato, où m'attend la fête du village et sa musique permanente empêchant tout repos.
Une vue d'une rue en pente que je trouve plutôt jolie.
Et une dernière vue depuis la Recoleta où il servent du grog à base de café.

1 commentaire:

  1. génial comme d'hab, plein d'humour et de curiosités....
    n'attend pas trop pour la suite, nous sommes impatients...

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